Certes on peut difficilement comparer le cadre feutré et sympathique du Meridien Jazz Club à l’atmosphère enfumée d’un juke-joint de Clarksdale, pourtant l’esprit du blues soufflait fort sur le XVIIème vendredi soir à Paris.
Trois natifs de l’état le plus pauvre des USA quasiment du même âge, trois représentants du blues, avec Zac Harmon l’homme de Jackson, la capitale, Vasti Jackson né à Mc Comb et l’homme de Pontotoc, dans les collines du Nord de l’Etat, Terry « Harmonica » Bean avec qui nous discutons et prenons des photos avant le début de la soirée.
Trois shows d’une heure, construits de façon identique à savoir, trois chansons de Vasti en solo, trois du trio avec Terry à l’harmonica, trois de Terry en solo puis retour au trio qui termine le set avec deux chansons.
Et c’est magique, on sent la volonté des musiciens, surtout Vasti et Zac de transmettre un héritage, d’expliquer les racines de leur musique, et de restituer le souvenir de Robert Johnson et Jimmy Rogers. Au hasard, “Love in Vain”, “Kind Hearted Woman Blues”, “Got my Mojo Working”, “Let’s the good time Roll” participent à cette mémoire à côté de titres personnels des musiciens “My Computer Turned On Me » et “Juke Joint Jump” pour Vasti ou“Stormin’ in Mississippi” pour Zac. Des styles différents, Vasti impeccable comme toujours dans son costume joue beaucoup de slide et renoue ainsi avec la vieille tradition, Zac est le plus « urbain », le plus classique, alors que Terry, très classe également dans sa belle chemise, reste la mémoire, le passeur celui qui fait le lien entre R.L.Burnside et la nouvelle génération de jeunes musiciens qui tentent de se faire un nom dans le delta.
Que dire, sinon que la soirée se prolongea tard dans la nuit, qu’après trois heures de musique, les trois musiciens étaient souriants et répondaient encore aux sollicitations, que cette musique sortie des doigts des pionniers reste la plus belle, la plus authentique quand elle jouée ainsi, que cette terre aride du Mississippi qui a supporté tant de douleurs et de malheurs, pour le peuple noir, est le berceau du blues et que rien ne peut et ne pourra l’exprimer mieux que ceux qui y sont nés et qui y vivent encore.